Fugitif de Gnoll ! [Quête Libre TERMINEE]

2 Sonedra 2272

Le voyage dans les brumes de l'Océan Génésus en compagnie du Capitaine Denil et de l'insupportable Dan ne s'était pas très mal passé, en fin de compte. Mais Ryxem ne préférait pas en parler ni même y penser. La seule chose qui lui importait désormais était l'argent qui reposait au fond de sa bourse, dans son sac de voyage. Mais voila, il errait toujours sans but dans sa vie. Il devait trouver un objectif à atteindre, mais ne sachant que faire, pour le moment, s'enrichir était sa plus grande priorité. C'est pourquoi il avait fait une fois de plus équipe avec Rasion Traquemort, l'Elfe de la Nuit sournois et voleur. Ayant un certains nombre de points communs avec ce dernier, notamment une affinité particulière pour le meurtre discret et la roublardise traître, il s'étaient tous deux dits que collaborer dans une affaire sordide - où la récompense serait juteuse - n'était pas une si mauvaise idée.
Ainsi étaient ils maintenant en train d'errer dans le Dalverden, étendue sauvage d'herbe bâtarde qui grattait les mollets et picotait les genoux, après avoir étés chargés par un patron de taverne, Nero Donarès, de retrouver un de ses amis archéologue, enlevé par une bande de Gnolls fugitifs. Ils avaient aussi eu un tuyau intéressant, comme quoi dans une semaine la bande des "Crocs Rouges" se séparerait pour attaquer un groupe de marchands. Dans ce cas, combien de Gnolls garderaient l'archéologue ? Ils ne le savaient pas, mais ils espéraient qu'il n'y en aurait que peu, car les Gnolls étaient réputés pour être des combattants coriaces, bien que ceux-ci seraient apparemment moins bien entraînés que leurs semblables des Marais d'Ossus.

Au bout de six jours de traversée, ils atteignirent enfin l'entrée de la Vallée des Glyphes. Il ne leur restait plus qu'une petite journée avant l'attaque des Gnolls. Ils devaient ce dépêcher de trouver le "Quignon de Pain", la colline où ils campaient. Tous d'abord, les deux comparses eurent l'idée de demander aux tribus mystiques qui gardent l'entrée des lieux, mais ils refuseraient sûrement de les laisser passer, pensant que le lieu est sacré. Décelant un passage où ils ne pourraient se faire repérer par les fanatiques, il se faufilèrent en laissant leurs montures.

Ils devaient maintenant trouver ladite colline, avant de réfléchir à un plan d'action. Ryxem commença alors à scruter les alentours avec sa vision, mais n'aperçu pas grand chose de significatif : l'air était chargé de magie, sûrement à cause des symboles runiques. Il devait se focaliser sur un point pour pouvoir avoir une image nette. Il lui était donc impossible de trouver quelque chose de précis s'il ne savait pas exactement de quoi il s'agissait. Il se tourna alors vers Rasion, et, désactivant son regard, dit silencieusement :

- "Je ne peux rien trouver ici. As-tu la moindre habilité en dépistage ? Il faudrait que nous trouvions ce "Quignon de Pain" et ces "Crocs Rouges" avant qu'ils ne tuent l'archéologue..."

Rasion regardait sa bourse, qu'il faisait virevolter en l'air dans le tintement métallique et agréable que font les pièces qui s'entrechoquent. Il n'avait même pas songé à subtiliser celle de Ryxem, et une entente commune règnait entre les deux voleurs. Cette entente se mua en coopération : les deux roublards se mirent d'accord pour unir leur aptitudes respectives, et par la sorte accroître leur revenu, illégalement ou pas. Il faut dire que Rasion appréciait le personnage : méfiant, sournois, subtil et surout possédant cette intelligence calculatrice si rare chez les êtres humains. De nombreux traits communs en somme. Mais Rasion ne franchit pas la frontière de l'amitié : leur entente s'arrêtait là, ils ne se connaissaient pas et ils ne désiraient pas se connaître. Qu'importe le passé ? Seul le moment présent compte.

Et les voilà, arpentant le Dalverden et son océan d'herbe hautes. Une vent frais et irrégulier leur fouettait le visage et cette étendue aurait pu être stérile de vie s'ils n'avaient pas aperçus des habitations rudimentaires de tribu nomade. Ils devaient libérer un vieil homme, pétri de connaissances sur les glyphes et "crucial" pour les projets de Nero Donarès, le tavernier. Qu'à cela ne tienne, ils étaient grassement payés, pour une affaire de moins d'une semaine. Qui plus est, Rasion n'avait jamais mis les pieds dans cette contrée monotone. Chaque touffe d'herbe haute semblait être la même, et ce, à des kilomètres à la ronde. Après presque une semaine de marche, où chaque jour se ressemblaient, le relief se fit de plus en plus vallonné, et l'herbe mordorée et irritante laissa la place à une herbe rase et d'un vert éclatant. L'entrée de la Vallée des Glyphes était obstrué par un campement de mystiques.

L'entrée leur fut refusée. "Terre Sacrée" ... Rasion garda son calme et réprima silencieusement une envie inutile de planter son poignard dans le larynx du mystique, et ils tournèrent les talons.
Ils parvinrent finalement à pénétrer dans la Vallée des Glyphes, laissant en contrepartie leur monture à sa frontière.

Lorsqu'ils furent hors de vue des yourtes des gardiens de la Vallée des Glyphes, Ryxem laissa libre cours à son pouvoir. Ses yeux prirent une couleur d'un bleu glacial, et sa pupille se dilata au point de disparaître complétement. Des spasmes agitaient ses tempes, et ces derniers cessèrent lorsque ses rétines redevinrent normales.

"Je ne peux rien trouver ici. As-tu la moindre habilité en dépistage ? Il faudrait que nous trouvions ce "Quignon de Pain" et ces "Crocs Rouges" avant qu'ils ne tuent l'archéologue..."

Les glyphes et la magie ambiante devait troubler sa vue... Rasion réfléchit pendant un court moment. Oui, il possédait des bribes de connaissances en pistage ; c'était la base de l'apprentissage à devenir guerrier dans son clan. Les souvenirs revinrent, et la voix caverneuse de son ancien maître résonna dans son crâne :

*Plus la végétation est touffue, plus le relief est fort : les pentes du relief permettent un écoulement raisonnable de l'eau, sans stagnation. Par conséquent, les collines sont toujours touffues lorsqu'elles sont seules, et non nombreuses en un périmètre donné, car cela formerait des "cuves", donc des lacs.*

Le Quignon de Pain devait posséder ce surnom car il devait être isolé : à quoi cela servirait de nommer une colline au beau milieu de collines semblables ?
La végétation de la vallée était plus concentrée vers l'Est. Le Quignon de Pain se trouvait donc à l'Est.

"En route vers l'Est" répondit calmement l'elfe noir.

Au bout d'une petite heure, le Quignon de Pain se dessina petit à petit, jusqu'à devenir imposant au point de faire de l'ombre aux deux mercenaires. Il méritait bien son nom : on aurait vraiment dit un quignon de pain qu'on aurait rompu et posé au beau mileu de la vallée. La zone ombragée était plus froide, et la végétation changeait d'apparence à vue d'oeil. Rasion remarqua tout de suite les empreintes à l'apparence humanoïde et terminées par des griffes qui avaient boursouflé le chemin. 90% des empreintes prenaient un itinéraire inverse à celui de Ryxem et Rasion.

"Elles sont fraîches. Ils sont partis de leur repaire il y a à peine deux heures. L'embuscade a peut-être eu lieu... ou pas. En tous cas, ils sont un peu moins d'une vingtaine à être partis. Ils ont du laisser deux-trois gnolls, un bande de plus de 20 gnolls étant rare. Les gnolls vivent en bande très réduites, mais il y en à énormément, ce qui est un vrai fléau pour les paysans. En route."

Ils poursuivirent leur itinéraire, qui les mena tout droit au campement des "Crocs Rouges".

"En route vers l'Est", dit soudainement l'Elfe de la Nuit, après une réflexion qui sembla le plonger dans de lointains souvenirs.

Ils se remirent en route, et avancèrent en faisant le moins de bruit possible. Il aurait suffit qu'ils croisent la bande de Gnolls qui allaient attaquer les marchands pour que c'en soit fini d'eux. Ils faisaient donc particulièrement attention aux détails du terrain. Au bout d'une heure de marche silencieuse, ils aperçurent le Quignon de Pain, véritable morphostructure géographique posée en plein milieu de la Vallée des Glyphes. Cet endroit était entouré d'une végétation abondante, qui pourrait constituer une cachette de dernier recours au cas où les Gnolls se rendraient compte de leur présence. Cependant, il semblerait qu'il n'en auraient pas besoin, car Rasion remarqua très vite de nombreuses traces de pas qui reflétaient le passage d'hybrides d'animaux et d'hommes : pas de doute, les Gnolls étaient déjà partis, et au vu du nombre d'empreintes, la surveillance de l'archéologue devait se trouver bien amoindrie.

"Elles sont fraîches. Ils sont partis de leur repaire il y a à peine deux heures. L'embuscade a peut-être eu lieu... Ou pas. En tous cas, ils sont un peu moins d'une vingtaine à être partis. Ils ont du laisser deux-trois Gnolls, un bande de plus de vingt Gnolls étant rare. Les Gnolls vivent en bande très réduites, mais il y en à énormément, ce qui est un vrai fléau pour les paysans. En route."

Ils entamèrent la montée du Quignon de Pain. Contrairement à ce que l'on pouvait penser, l'endroit était surélevé, et assez grand : ce n'était pas une motte de terre, mais un demi-mont. Le campement des "Crocs Rouges" pouvait se trouver n'importe où sur leur chemin. Ryxem leva la tête au ciel. Erion se trouvait presque à son zénith. Ils devaient se dépêcher, bien que les Gnolls soient assez désorganisés, sinon ils pourraient faire de mauvaises rencontres... Ils cherchèrent le campement sans rien trouver. Leur aurait-on menti ? Cette hypothèse n'était pas à exclure, cependant il valait mieux éviter les conclusions hâtives pour le moment. Etant plus en altitude - car ayant gravi l'imposant Quignon de Pain - la présence de runes se fit moins significative. Ryxem activa donc sa vision. Les mouvements bleutés ne cessaient de virevolter dans l'atmosphère blanche et blafarde. Il ne détecta aucun signe de Gnoll sur la colline. Dans ce cas, où était leur campement ? Il dit alors à Rasion :

- "Ils ne semblent pas être ici.", avant de marquer une pause durant laquelle il réfléchit, puis dit : "A moins... Que leur campement soit sur l'autre versant de la colline, face au soleil. Nous devrions vérifier. "

Et ils reprirent la marche en direction de l'autre coté du Quignon de Pain. Ils descendirent de quelques "étages" par une vielle route escarpée. Et là, ils virent l'affaire tant attendue. Le campement des "Crocs Rouges" était là. Quatre guerriers Gnolls gardaient une cage où un vieil homme était assis, mourant de faim et de soif. Des débris et d'autres amoncèlements - qui semblaient être des cahuttes - montraient la bestialité et la sauvagerie des humanoïdes. Ils ne semblaient pas les avoir aperçu. Les deux voleurs remontèrent alors la colline, pour les surplomber en ayant un risque zéro de menace. Ryxem se tourna vers Rasion et demanda :

- "Possèdes-tu des armes de jet ? Nous pourrions les atteindre d'ici. Je ne pense pas qu'ils exécuteraient l'archéologue, car ils veulent la rançon de 20 000 Pièces d'Or. Ou alors, nous pourrions nous servir d'un de tes poisons pour en enduire mes flèches. En as-tu ?"

Le dénivellé du Quignon de Pain était forte, mais le sentier était quand à lui adouci par les pentes lisses et boisées du demi-mont. Vraiment, on aurait pu classer cette colline comme tel : une fourrure de verdure épaisse, la hauteur d'une petite montagne, et des pentes douces. Ryxem et Rasion cherchèrent le campement des yeux, en vain, jusqu'à atteindre le somment du Quignon de Pain. Ryxem leva la tête vers l'astre diurne, qui était à son plus haut point et qui inondait la vallée des ses rayons chauds. En effet, l'air s'était réchauffé depuis quelque temps... Il fallait vraiment se dépêcher : les hurlements guturaux de gnolls à leur trousse ne lui disait rien qui vaille.

"Tu penses qu'on a été roulé dans la farine ?"

Pas de réponse. Rasion tourna la tête vers son associé, et vit les orbites bleuies de ce dernier, qui reprirent leur couleur blanchâtre.

- "Ils ne semblent pas être ici..." dit-il, avant de marquer une pause."A moins... Que leur campement soit sur l'autre versant de la colline, face au soleil. Nous devrions vérifier. "

Rasion soupira silencieusement, et ils bifurquèrent vers le versant est. Ils empruntèrent une petite route escarpée et sinueuse, qui, après avoir descendu une petite denivellée en oblique, les mena tout droit à leur but. Le campement des "Crocs-rouges" leur faisait face.
Quatre Gnolls avaient étés assignés à garder l'archéologue, qui se lamentait dans ses pensées et semblait décrépir. L'Elfe nota l'équipement de chaque Gnoll : deux possédaient de grandes Haches à deux mains, de facture grossière. Ils seraient par conséquent lents et moins vifs au combat, mais pourraient infliger de sérieuses blessures. Le troisième, borgne et au visage couturé de cicatrice, tenait une arbalète aux carreaux rouillés entre ses mains. Quand au dernier, il semblait inexpérimenté, et s'entraînait dans un chuintement métallique incessant à taillader un poteau de bois à l'aide d'une lame courte.

Silencieusement, les deux voleurs remontèrent la pente, pour aller prend appui sur l'une des barres rocheuse qui étaient curieusement très fréquentes sur ce versant ensoleillé. De là, ils avaient une vue à 180° sur le campement, et les Gnolls ne pouvaient les voir qu'en reculant assez pour que leur angle de vue soit à la bonne hauteur, ce qui était peu probable.

*Parfait... On a notre tireur d'élite, et notre coupe-jarret caché...* pensa Rasion.

A ce moment précis, Ryxem se tourna vers l'Elfe Noir :

- "Possèdes-tu des armes de jet ? Nous pourrions les atteindre d'ici. Je ne pense pas qu'ils exécuteraient l'archéologue, car ils veulent la rançon de 20 000 Pièces d'Or. Ou alors, nous pourrions nous servir d'un de tes poisons pour en enduire mes flèches. En as-tu ?"

Des armes de jet ? Non, il n'en avait malheureusement pas, et de toute façon il ne possédait pas la dextérité nécessaire pour projetter des éclats mortels sur ces créatures.
En revanche, Ryxem avait fait mouche lorsqu'il lui parla de poison. Rasion sourit à ce dernier :

"Bien sûr que j'en ai. J'en ai même deux fioles, chacune contenant un breuvage aux effets indésirables. Veux-tu : du poison engourdissant les membres ou du poison attaquant les capacités mentales momentanément ? Le premier a pour avantage de durer plus de deux minutes, ce qui est assez pour abattre l'ennemi d'un carreau dans la tête ou d'une dague entre les omoplates. Le second est vraiment efficace contre les mages et autres utilisateurs de mana. Hum... Je pense que le choix est fait."

Et l'Elfe Noir sortit de sa petite besace de cuir noirci une fiole contenant un liquide d'un vert limpide, et lorsque qu'il ôta le bouchon, des bulles se formèrent pour remonter à la surface, dans un pétillement écœurant.

"Je l'ai fait moi-même. Composition secrète. Si j'avais trouvé des Baies Rougelangues, j'aurai pu intensifier ses effets. Mais peu importe. Prend ça aussi."

Rasion referma le bouchon de la fiole, qu'il tendit à Ryxem, et sortit de son sac des feuilles en forme de "X", et possédant une couleur vert-foncé.

"C'est du Sevear. J'en ai volé à l'auberge. Cela va améliorer tes performances physiques, au cas où le besoin se ferai sentir."

Et ils préparèrent la future attaque...

Rasion n'avait donc pas de projectiles ou d'armes de jet. Tant pis. Par contre, il avait du poison et en était fier :

"Bien sûr que j'en ai. J'en ai même deux fioles, chacune contenant un breuvage aux effets indésirables. Veux-tu : du poison engourdissant les membres ou du poison attaquant les capacités mentales momentanément ? Le premier a pour avantage de durer plus de deux minutes, ce qui est assez pour abattre l'ennemi d'un carreau dans la tête ou d'une dague entre les omoplates. Le second est vraiment efficace contre les mages et autres utilisateurs de mana. Hum... Je pense que le choix est fait. Je l'ai fait moi-même. Composition secrète. Si j'avais trouvé des Baies Rougelangues, j'aurai pu intensifier ses effets. Mais peu importe. Prend ça aussi."

Bien évidemment, le poison paralysant était la meilleur affaire, surtout s'il fallait garder l'archéologue en vie le temps de massacrer les Gnolls. Il donna la fiole a Ryxem, qui la posa par terre. Puis, il tira de sa besace une poignée de feuilles étranges. Voyant le regard interrogateur du voleur, l'Elfe Noir dit :

"C'est du Sevear. J'en ai volé à l'auberge. Cela va améliorer tes performances physiques, au cas où le besoin se ferait sentir."

L'Elfe avait vraiment des ressources incroyables. Un peu réticent au commencement, Ryxem mangea les feuilles. Elles avaient un goût âpre et déplaisant, et leur effet ne se fit pas sentir immédiatement, cependant il faisait confiance à Rasion pour ce qui était des produits louches et souvent illicites. Il prit plusieurs des flèches de son carquois et versa des lampées de la fiole de poison du Missionnaire Secret. Le suc verdâtre dégoulinait des carreaux du mercenaire, et sentait la mort à plein nez. Ce devait être rudement puissant. Ryxem prit un de ces carreaux empoisonnés et banda son arbalète. Il activa ensuite sa vision et se tint prêt à faire feu. Il vit un Gnoll armé d'une arbalète. Il semblait être le plus puissant d'entre tous, et pourrait tirer sur Ryxem et Rasion, voire abattre l'archéologue. C'était donc celui qu'il fallait occire en premier. Ryxem se mit en joue et était prêt à abattre le Gnoll borgne. Il se tourna vers l'Elfe et dit :

- "Les attendons-nous ici, ou est-ce que tu préfères descendre et que je te couvre avec mon arbalète ?"

Ryxem avait enduit le carreau de poison, et le bandait à présent son arbalète. Il avait fait confiance à Rasion pour le Sevear : c'était le début d'une association qui allait être très profitable. Un tueur à distance, et un gêneur. Deux fauteurs de trouble, qui, en synergie, sèment la mort, efficacement, silencieusement, rapidement...

- "Les attendons-nous ici, ou est-ce que tu préfères descendre et que je te couvre avec mon arbalète ?" demanda Ryxem, en joue.

L'elfe noir réfléchit un moment. Il avait enduit son poignard de poison quelques minutes auparavant, et mâchouillait du Sevear, comme le tireur d'élite. Sa vue, bien moins efficace que celle de Ryxem, mais néanmoins perçante, se focalisa sur le Gnoll armé d'une arbalète.

"Abats-moi celui avec une arbalète... Il pourrait devenir une vraie plaie : il peut t'atteindre et en outre exécuter le vieillard s' il sent que le combat tourne en sa défaveur. Ensuite, essaye de viser les gros manieurs de hache. Ils sont lents et je pense pouvoir réussir à en tuer un, mais à deux cela se révélera être ardu. Dernière chose : vise bien la tête, je sais que c'est ta spécialité, alors ne me déçois pas, ce qui m'étonnerai de toi de toute façon. Si le carreau effleure leur cou, qu'à cela ne tienne, le poison sera immédiat, étant proche des nerfs cérébraux. Bon, j'y vais. Crées moi un sacré bazar, et je ferai de même. Bonne chance..."

Rasion sourit malicieusement et disparut, pour réapparaître en contrebas, marchant d'un pas inaudible, et se rapprochant irrésistiblement du jeune gnoll qui s'entraînait. ll contourna une tente faite de peau de gibier, évitant de passer près des deux gros Gnolls, et s'enfonça derrière les lignes ennemis, pour atterrir à moins de cinq mètres du néophyte, derrière les feuillages...

*Il ne me remarquera même pas passer derrière son dos, et n'entendra pas mon poignard siffler : il cause tellement de bruit inutile avec son épée contre ce poteau émaillé de fer...*, pensa le missionnaire secret.

L'adrénaline emplissait son corps, et l'effet du Savear n'allait pas tarder...

Rasion imita Ryxem en mangeant le Sevear et en enduisant sa lame de poison puis dit, suite à la question de l'archer :

"Abats-moi celui avec une arbalète... Il pourrait devenir une vraie plaie : il peut t'atteindre et en outre exécuter le vieillard s'il sent que le combat tourne en sa défaveur. Ensuite, essaye de viser les gros manieurs de hache. Ils sont lents et je pense pouvoir réussir à en tuer un, mais à deux cela se révélera être ardu. Dernière chose : vise bien la tête, je sais que c'est ta spécialité, alors ne me déçois pas, ce qui m'étonnerai de toi de toute façon. Si le carreau effleure leur cou, qu'à cela ne tienne, le poison sera immédiat, étant proche des nerfs cérébraux. Bon, j'y vais. Crées moi un sacré bazar, et je ferai de même. Bonne chance..."

Et il commença a descendre la pente abrupte pour attaquer le Gnoll le plus faible en apparence. Il glissa avec une discrétion extrême et sauta dans les feuillages. Ryxem se prépara à tirer sur le Gnoll arbalétrier pendant que Rasion se mettait en position. Le néophyte n'entendait pas le missionnaire s'approcher doucement et Ryxem était prêt.

L'opération commença dans un claquement de métal. Le carreau fusa de l'arbalète de Ryxem et alla se ficher dans l'épaule droite du Gnoll à l'arbalète, qui se tordit de douleur dans un couinement atroce. Merde ! Ryxem venait de louper son tir comme un débutant ! Pendant ce temps, Rasion bondit sur le plus chétif des Gnolls, et lui tallaida le poitrail et le cou avec sa dague. Sous l'effet du poison, le bestiau fut prit de convulsions et tomba au sol, mais les deux Gnolls armés de haches remarquèrent Ryxem et Rasion, et se séparèrent pour les attaquer. Alors que l'Elfe se débattait avec deux Gnolls blessés - dont l'un gravement et l'autre assez passif - et un en pleine forme, Ryxem allait avoir fort à faire contre ce monstre.
Le Gnoll commença à grimper le chemin sinueux qui était le passage obligé vers l'archer, ce qui laissa à Ryxem quelques secondes pour recharger son arbalète. Il fit feu et acheva le Gnoll le plus chétif, d'un carreau en pleine tête. Rah ! Pourquoi avait-il manqué le plus puissant des Gnolls et touché le plus faible ? Sûrement un coup du destin... Il laissa choir son arme au sol, pour dégainer sa dague. Bien sur, elle ne serait pas de taille contre la hache du guerrier Gnoll.

- "Rasion ! Ca ne se passe pas comme prévu !", cria t-il à son confrère avant de bondir sur la coté pour esquiver un puissant coup de hache et de se remettre en garde.

*Merde. J'espère qu'on ne va pas y rester...*

Rasion avait engagé le combat, et, profitant de l'effet de surprise, il planta sa lame crantée en pleine échine du jeune Gnoll, qui ne réagit qu'après avoir essuyé de nombreux taillades. Le Missionnaire Secret esquiva un grossier coup d'estoc, et et riposta soudainement, labourant profondément le poitrail de son adversaire, qui poussa un grognement plaintif de douleur. Le poison faisait son effet, les mouvements de la créature étaient moins précis, nonchalants. Un gnoll rugit derrière le dos de Rasion, brandissant sa hache. Rasion roula sur le côté et la hache alla lourdement se figer à l'endroit où il se trouvait auparavant, provoquant une fissure béante de terre au milieu de l'herbe. L'arbalétrier n'était pas mort apparemment, puisqu'il se tenait derrière la grande brute, rechargeant avec difficulté un carreau. L'espace d'une seconde, Rasion put voir un carreau planté dans son épaule, avant de se baisser et esquiver le coup circulaire qui faillit le fendre en deux.

"Ryxem a raté son coup. Pas de chance, mais bon, l'erreur est humaine. Le poison au moins fera son effet dans... Environ 3 minutes. Tuons d'abord le jeunot. J'improviserai après."

Ce dernier gisait par terre, dans un spasme d'agonie. Au moment où Rasion avait prévu de l'achever, un carreau lui transperça la calotte crânienne, au grand damn de l'Elfe. D'un coup d'oeil vif, il vit son associé au prise avec un des deux guerriers.

- "Rasion ! Ca ne se passe pas comme prévu !" cria-t-il.

Bien sûr que ça ne se passe pas comme prévu...

"Réfléchissons, vite, vite... Garder son sang froid, esquiver un maximum et porter des coups vifs et peu puissants à la gorge. Secourir Ryxem. Deux Gnolls souffrant momentanément du poison et ralentis, laisse le temps à Ryxem de les abattre."

En une fraction de seconde, Rasion adopta son plan inespéré. Une sifflement perça le tumulte métallique des armes. L'elfe noir compris, et sa baissa, tête en arrière. Le temps était comme figé, et il vit le trait mortel passer au dessus de sa tête, éraflant au passage son plastron de cuir... Un mince filet de sang gicla au niveau du nombril. Le missionnaire secret se retrouva dos à terre, le temps et les rugissements des gnolls étaient redevenu audible... Les tempes en feu et l'adrénaline au maximum, Rasion effectua une roulade en arrière et se releva prestement. Le Sevear, couplé à ses talents d'acrobate, lui avait sauvé la vie. Il toisa ses adversaires, qui restèrent immobiles. L'arbalétrier était secoué de léger spasmes : le breuvage vénéneux agissait. Le guerrier à la hache rugit, et chargea tête baissé. Sûr de ses capacités, l'Elfe tenta de se dérober sur la gauche, mais il fut secoué par cet assaut brutal, et fut projeté contre une tronc d'arbre. Il en eut le souffle coupé : la force de ce Gnoll était impressionnante, il aurait pu rivaliser avec Tigork dans un duel de lutte...

"Pas le temps d'inoculer mon poison..."

L'Elfe fit craquer ses articulations meurtries, et fonça secourir son confrère, poignard tiré. Le guerrier Gnoll était à ses trousses, mais peinait à enjamber racines, souches et végétation dense.

Une soif de meurtre saisissait Rasion...

Rasion marmonna plusieurs paroles que Ryxem ne put entendre, étant donné qu'il était trop loin de lui. Ah... C'était une affaire bien mal tournée que celle là. L'Elfe était vraiment blessé. Pas gravement dans l'ensemble, mais son corps était couturé de coupures. Il saignait du ventre et de l'épaule, notamment, ce qui allait surement compliquer les choses. Cependant, le point positif était que le Gnoll archer allait bientôt cesser les importuner, le poison paralysant commençant à faire un effet certain.
Un coup de hache replongea Ryxem dans ses pensées réelles. Il bondit à nouveau, évitant un coup lâche en forme d'angle droit que lui avait asséné la créature. Il se releva et lui taillada le genou avec sa dague puis fit une roulade arrière pour pallier toute contre-attaque. Le Sevear était formidable : sans lui, il serait mort depuis plusieurs minutes au moins. Ryxem était néanmoins confiant, bientôt le poison allait engourdir la jambe du Gnoll guerrier, ce qui faciliterait les choses.

*Merde, j'ai oublié de l'enduire de poison onques !*

Un coup de coude en pleine poitrine le projeta violemment contre un roc. Sonné, Ryxem allait recevoir un coup mortel lorsque Rasion intervint et planta son poignard entre les omoplates du Gnoll guerrier, qui se retourna vivement pour attaquer son assaillant. Rasion fit une roulade pour esquiver, et Ryxem chargea celui qui maintenant lui tournait le dos. Le Gnoll fut envoyé contre la falaise, et il manqua de faire une chute vertigineuse sur son propre campement. Rasion lui fit alors un croque en jambes, ce qui le fit s'écraser sur un amoncèlement de métal et bois. Un craquement sourd fit comprendre que quelques-une de ses vertèbres s'étaient rompues sur le coup. Il sembla cependant se relever avec peine, et se diriger vers la cage de l'archéologue. Ryxem se dit qu'il fallait l'en empêcher à tout prix.
Il aperçu alors le deuxième Gnoll guerrier se diriger vers Rasion et lui-même. Il donna un coup de hache à Ryxem, qui se fit écorcher la jambe en tentant de l'esquiver.

- "Rasion ! Occupe toi de lui quelques instants !", cria Ryxem.

L'Elfe donna un coup au Gnoll et commença à le titiller pour qu'il s'éloigne de l'Humain. Ryxem prit alors son arbalète, encocha un carreau et déclencha sa vision. Le Gnoll allait abattre sa hache sur l'homme affaibli, quand un trait mortel toucha sa jugulaire et la fit exploser en une salve sanguinaire. Il tomba parterre mort, à coté du cadavre du néophyte Gnoll et du corps pris de convulsions de l'archer. Bien, la vie de l'archéologue était préservée. Ryxem conserva sa vision mais lâcha son arbalète. Il alla ensuite secourir Rasion...

[Hors-Jeu : Le coup en angle droit XD]

Rasion écarta précipitamment les branches de la main gauche, et aperçut, à quelques mètres, Ryxem, dos contre un rocher, ayant l'air visiblement sonné. Le Missionnaire Secret ne perdit pas son temps, il effectua une large foulée de la jambe droite, pris appui avec son pied gauche contre une souche qui jonchait entre lui et le deuxième Gnoll, et s'élança sauvagement contre ce dernier. Sa vision se focalisa sur les omoplates saillantes de l'Homme-Hyène, et l'action suivit la pensée. La créature couina de douleur, et eut un réflexe défensif que l'Elfe évita d'un roulade en arrière. Rasion manqua de percuter la souche ! Le Gnoll le toisait, babines retroussés, et brandit haut sa large hache. Il n'eut pas le temps de faire quoi que ce soit, Ryxem le percuta violemment dans le dos, ce qui lui fit perdre appui. Rasion vit la créature passer au dessus de sa tête, trébuchant contre la souche et roulant sur le côté droit. Le vide lui chatouillait le dos. Trente centimètres et la mort le prenait... L'Elfe Noir en décida autrement, et il effectua la sale besogne en se plaçant derrière son dos : il lui fit un croque en jambes vicieux, poussant la patte du Gnoll en avant. Celui-ci tomba en arrière, et glissa dans le vide, provoquant une petite chute de pierre. Rasion entendit un couinement enroué, puis un bruit mat d'os brisés. Malheureusement, les Gnolls étant trappus, il parvînt à se relever, et ses yeux injectés de sang dardaient l'archéologue.
Un hurlement sanguinaire fit sursauter l'Elfe Noir : le deuxième Gnoll était là, et Ryxem avait manqué de peu de se faire pourfendre en deux.

"Rasion ! Occupe toi de lui quelques instants !" cria-t-il.

Sitôt demandé, sitôt fait, l'Elfe s'exécuta et il plaça un coup rapide et circulaire, qui érafla la museau de la bête. Le Gnoll grogna de rage, et ses coups devinrent de plus en plus rapides, et de plus en plus imprécis.

"Vas-y mon gros... Enerves-toi, je n'attends que ça..."

Le combat se déroulait en une même séquence répétée : Rasion esquivait, puis donnait une taillade, sans parvenir à trancher de tendon car le Gnoll, dans sa fureur, ne lui laissait pas le temps de placer des coups plus lents. Au bout d'un certain temps, l'Homme-Hyène sentit ses muscles s'engourdir : sa vue était légèrement brouillée et sa hache un peu plus lourde. L'Elfe Noir en profita pour le désarmer, en donnant un coup de pied circulaire en plein poignets, alors que l'arme du Gnoll touchait le sol. L'Homme-Hyène n'en avait plus pour longtemps, il le savait...

Dans un ultime rugissement de désespoir, il saisit son insaisissable ennemi au cou, et planta aussi profondément ses crocs que possible. Ses dents pénétrèrent dans le cuir, puis le goût du sang lui titilla les papilles. Le Gnoll voulut déchirer le tendon de l'épaule, mais ses mâchoires ne répondirent plus. Une sensation glacée lui emplit le crâne, et son propre sang noir coula le long de son museau. Les pensées meurtrières de l'Homme-Hyène s'estompèrent, et il s'affala dans un râle, un poignard planté profondément dans la tête au niveau du trou occipital...

Rasion jura : son plastron de cuir lui avait sauvé le bras gauche, et la blessure saignait plus qu'elle ne faisait mal. Mais il fallait arrêter l'hémorragie externe.

Mis à part cela, Ryxem semblait en avoir finit avec le premier. Il ne restait plus que l'arbalétrier, qui avait l'air de mieux se porter...

Lorsque Ryxem arriva au niveau de l'Elfe Noir - qui s'était éloigné avec le Gnoll, ce dernier était en sang. De son épaule coulait un sang écarlate, et de son bras et du cadavre du Gnoll un sang sombre comme de l'encre. Il en avait fini avec lui, à en juger par l'état des lieux. Le Quignon de Pain pourrait maintenant être renommé la Colline du Boucher... Voyant que son comparse ne se portait pas très bien, Ryxem pris la serviette avec laquelle il s'épongeait le front et fit un bandage à Rasion. Ce n'était que sommaire, mais c'était juste pour qu'il ne se vide pas de son sang, malgré une blessure peu grave. Ce n'était cependant pas fini.

Le Gnoll archer s'était relevé, le poison devant se diluer dans ses veines. Fou de rage en voyant les cadavres de deux de ses compagnons et sentant la présence du dernier cadavre en haut de la petite montée, il tira les deux flèches enduites de poison fichées dans les corps noyées dans le sang d'ébène, et en encocha une dans son arbalète de faction médiocre. Il poussa un hurlement guttural avant de tirer la première flèche sur Ryxem, qui esquiva de justesse grâce à ses yeux magiques. Le Gnoll grogna et un tissu de jappement fit comprendre qu'il jurait. Il encocha la deuxième flèche et commença à gravir la pente moyenne l'arbalète à la main. Rasion était adossé à un rocher, et éprouvait des difficultés à mouvoir son bras gauche. Ryxem en déduisit donc que c'était à lui d'abattre le dernier des Gnolls, cependant que sa vision commençait à défaillir. Il devait se hâter.

Le voleur bondit sur son arbalète, et se rendit compte avec stupeur... Qu'il n'avait plus de flèches, le carquois étant tombé du haut du promontoire lorsqu'il l'avait laissé choir au sol. Il aurait fallu qu'il puisse récupérer les carreaux en bon état qui étaient tombés. Cependant, le Gnoll montait toujours avec ardeur et était presque au niveau des deux mercenaires. Ryxem eut alors une idée : il se saisit de son poignard, et, visant le Gnoll, lui lança dans la tête. Ses yeux étaient défaillants à cet instant, c'est pourquoi il le toucha au poitrail, au lieu de l'occire sur le coup de façon propre et nette. Il était en bien fâcheuse posture...
L'Homme-Hyène parvint à monter jusqu'à eux. Il tira. Essayant d'esquiver, Ryxem se prit la flèche dans le bras droit, et sentit immédiatement le reste du poison se trouvant sur cette dernière s'inoculer en lui. Il tomba au sol, et pendant qu'il tentait de se relever, le Gnoll rechargeait vicieusement son arme avec un projectile rouillé. Alors qu'il avançait vers Ryxem, Rasion lui lança sa dague qu'il attrapa et enfonça violemment dans la mâchoire de son assaillant qui s'effondra au sol. Ryxem se releva en toute hâte, arrachant la flèche de son bras et se faisant un bandage à lui aussi avec du matériel inadapté. L'Elfe Noir était plus mal en point que lui, mais il devaient se hâter avant que le reste de la tribu Gnolle ne revienne.

- "Reste ici Rasion. Essaies de te relever et récupères ta dague. Je vais chercher l'archéologue et on se tire d'ici illico presto.", dit-il avant de ramasser ses armes et de commencer à descendre l'abrupte pente. Une fois arrivé en bas, il récupéra son carquois et les quelques flèches encore en bon état, et il trancha les liens de l'archéologue.

"Vous m'avez sauvé ! Merci de tout coeur !", criait le bonhomme à tout bout de champ.

- "Cela est bien, mais nous devons nous dépêcher avant que les autres ne reviennent.", répliqua Ryxem avant de remonter voir Rasion. Ce dernier s'était relevé, et avait récupéré poison et arme. Ils se mirent en route vers l'endroit où ils avaient laissés leurs montures, suivant leurs propres empreintes de pas à toute vitesse...

Ryxem et Rasion, suivis du vielliard pénible à force de s'égosiller et de s'agenouiller (ce qui était amusant et plaisant au début, mais agaçant à la fin, car cela les retardait), parvinrent à descendre le Quignon de Pain sans difficulté. Aucun Gnoll armé jusqu'aux dents ne vint croiser leur route, et Rasion avait soigneusement et méthodiquement effacé toute trace qui pourraient les trahir.

"C'est tout bonnement formidable ! Deux freluquets comme vous ayant réussi à terrasser ces bêtes hideuses et cruelles ! Tout bonnement for-mi-da-ble !" criait à qui pouvait l'entendre l'archéologue.

A force d'hyperboles constantes qui sortaient de la bouche du vieillard, Rasion hésita sérieusement à l'assomer. Il allait les faire repérer lorsqu'il passerai la frontière les ramenant à l'étendue d'herbe haute. L'Elfe regarda Ryxem, qui haussa les épaules et regarda droit devant lui.

Les deux associés, ou plutôt désormais les deux amis, aperçurent le passage interdit, qui abritait leurs montures.

"Tant mieux, on n'aura plus à marcher..." pensa vaguement le Missionaire Secret.

Une question le taraudait cependant : qui prendrait le vieillard sur sa monture ? Cette question fut balayée d'emblée lorsque, une fois arrivé à une dizaine de mètre de leur monture, un mystique leur fit face.

Ils partirent du Quignon de Pain avec l'archéologue, bien décidés à empocher la récompense, malgré les cris de joie que ce dernier poussait. Ryxem et Rasion avaient franchement hésité à l'assommer pour qu'il se taise, mais comme la demande de Nero précisait "en bonne santé", et une perte de ne serait-ce qu'une once des gains n'était pas envisageable, même s'il fallait pour cela se taper les remerciements incessants du vieil homme. Ils marchèrent moins longtemps qu'à l'aller, car ils suivaient leurs propres traces - que Rasion prenait ensuite soin d'effacer à l'aide d'un branchage qu'il fouettait sur le sol. Ainsi, on ne remarquerait rien.

"Tant mieux, on n'aura plus à marcher..."

Ryxem leva la tête devant lui, car il restait fixé sur ses blessures et celles de son compagnon. Ils souffraient, car le combat contre le Gnolls avait été rude et difficile. Ils pouvaient encore progresser... Il vit les deux chevaux et comprit alors la remarque de Rasion. Cependant, il vit aussi un groupe de mystiques qui semblaient intrigués par les bêtes. Ils partirent finalement et ne laissèrent qu'un seul illuminé. Ils devraient encore combattre s'ils voudraient s'enfuir avec leurs destriers. Ils devaient se hâter car les Gnolls sont des êtres revanchards. Ils ne tolèreraient surement pas la fuite de leur otage et des meurtriers de ses gardes.

Il y avait cependant le problème du mystique, qui bien qu'il ne semblait pas très fort, pouvait être considéré comme un problème à cause des blessures des deux comparses. Ryxem chargea son arbalète et activa sa vision. Il fit ensuite un signe à Rasion pour montrer qu'il était prêt à agir.

Ryxem avait chargé un carreau dans un chuintement métallique et, d'un signe de tête, prévînt Rasion qu'il était prêt à lâcher un trait mortel qui irait transpercer les cervicales du mystique. Enfin, c'était la version de l'elfe noir. Il ne fallait pas faire de bruit. Alors Rasion chuchota le plus bas possible, tout en ayant intimé l'ordre de se taire au vieil homme d'un regard dur et acéré.

"Ecoute, voilà ce qu'on va faire... Je vais aller dans sa direction, et lui demander de l'aide... Regarde mes bandages, je pisse le sang... Bon... Les mystiques sont ici pacifiques, il ne me fera pas de mal, du moins pas sans l'avis de ses confrères... A toi de décider de le tuer... Ou pas... On peut très bien le dépouiller, ce qui nous fera une tenue de mystique et peut-être un peu d'argent, et je pourrai ensuite lui inoculer mon poison de trouble mental... Il ne se souviendra de rien tant que l'on agit rapidement.... Je parlerai aussi fort que je peux, hurlant de douleur et invoquant à l'aide, maudissant les gnolls qui saccagent la faune de la vallée... Héhéhé... S'il me demande à qui appartient la deuxième monture, je répondrais que c'était celle de ma défunte femme ou fils... Shaera bel'yia ae audaevelas... (La chance sourit aux audacieux)"

Et le Missionaire Secret sortit de sa cachette en courant tant bien que mal, comme s'il avait la Mort à ses trousses, et en veillant à claudiquer un minimum. Le mystique accourut vers lui.

En réponse au regard interrogateur de Ryxem, Rasion répondit :

"Ecoute, voilà ce qu'on va faire... Je vais aller dans sa direction, et lui demander de l'aide... Regarde mes bandages, je pisse le sang... Bon... Les mystiques sont ici pacifiques, il ne me fera pas de mal, du moins pas sans l'avis de ses confrères... A toi de décider de le tuer... Ou pas... On peut très bien le dépouiller, ce qui nous fera une tenue de mystique et peut-être un peu d'argent, et je pourrai ensuite lui inoculer mon poison de trouble mental... Il ne se souviendra de rien tant que l'on agit rapidement.... Je parlerai aussi fort que je peux, hurlant de douleur et invoquant à l'aide, maudissant les Gnolls qui saccagent la faune de la vallée... Héhéhé... S'il me demande à qui appartient la deuxième monture, je répondrais que c'était celle de ma défunte femme ou fils... Shaera bel'yia ae audaevelas... (La chance sourit aux audacieux)"

La proposition de l'Elfe Noir n'était pas mauvaise, mais il y avait mieux à faire que gaspiller du poison et laisser un mystique en vie. Ryxem réfléchit quelques secondes puis dit :

- "C'est un plan astucieux. Cependant, nous pouvons faire plus simple. Je pourrais l'abattre d'ici, et nous pourrions maquiller ce crime en donnant des coups de couteaux pour faire croire à une attaque de Gnolls. Avec ma vue particulière, j'ai bien observé la méthode de combat bâtarde de ces monstres et je pense pouvoir reproduire les lacérations. A moins, bien sur, que tu ne veuilles garder ses habits pour infiltrer le campement. A toi de voir, car aucune des propositions de me dérange."

Juste avant que l'Elfe Noir ne sorte des fourrés, Ryxem lui avait glissé :

- "C'est un plan astucieux. Cependant, nous pouvons faire plus simple. Je pourrais l'abattre d'ici, et nous pourrions maquiller ce crime en donnant des coups de couteaux pour faire croire à une attaque de Gnolls. Avec ma vue particulière, j'ai bien observé la méthode de combat bâtarde de ces monstres et je pense pouvoir reproduire les lacérations. A moins, bien sur, que tu ne veuilles garder ses habits pour infiltrer le campement. A toi de voir, car aucune des propositions de me dérange."

Rasion avait fait volte face, la main prêt à écarter les branches et l'épais feuillage, et, après avoir pesé le pour et le contre l'espace de quelques secondes, il avait chuchoté :

"Alors fait ton sinistre devoir, puis on maquille la scène du crime. Une tenue de mystique tout compte fait ne nous servirait à rien, ils doivent avoir un moyen magique pour se reconnaitre."

Puis après avoir exécuté son plan tordu, le mystique accourra vers lui. La pointe de l'arbalète de Ryxem luisait au soleil, invisible et rivée vers la nuque du mystique. Une détente et une vie arrêtait son cours...

"Alors fait ton sinistre devoir, puis on maquille la scène du crime. Une tenue de mystique tout compte fait ne nous servirait à rien, ils doivent avoir un moyen magique pour se reconnaitre."

- "Mon sinistre devoir dis-tu ?", répliqua Ryxem avant de continuer : "Tuer n'est pas un problème, il s'agit même d'une solution, car les morts ne parlent ni n'agissent. Mon carreau est prêt, et d'un seul geste j'ôterais la vie de ce nomade. Allons-y."

Rasion avait donc apprécié l'idée de Ryxem, et allait maintenant commencer à exécuter l'opération telle qu'ils l'avaient prévue. L'Elfe Noir s'avança vers le mystique, se déplaçant comme si la mort était à ses trousses et n'allait pas tarder à ravir son âme. L'homme, dans toute sa bonté - mais se posant quand même la question de savoir ce qu'il faisait dans la Vallée des Glyphes, décida d'aider Rasion. Implorant les dieux et maudissant les Gnolls qui avaient tués sa femme, le Missionnaire Secret essaya de persuader le mystique de se retourner pour qu'il panse ses plaies. L'homme pivota pour examiner les coups de lames que Rasion portait sur le torse. Un cliquetis métallique se fit entendre marquant à la fois le début et la fin des hostilités, comme lors de l'assaut contre les Hommes-Hyènes. Le trait de bois et d'acier fusa de son encoche, perforant l'air avec un sifflement sonore presque imperceptible. La pointe aiguisée du carreau transperça la nuque du mystique, ressortant par la gorge dans une giclée de sang qui atterrit sur l'Elfe Noir. Les cervicales du nomades ayant été manquées, l'homme survécu avec une sale blessure. Se retournant vivement pour déceler son assaillant invisible, le nomade tourna le dos au fourbe Rasion. Ce dernier dégaina sa dague et la plante entre les omoplates de son ex-bienfaiteur qui s'écroula au sol. Ryxem s'avança et dit :

- "Bien. As-tu observé les traces laissées par les Gnolls ?"

Il fallait en effet effacer toute trace de combat. Le Missionnaire Secret regarda le corps inanimé et serein du mystique : il avait fallu le tuer, ou compromettre leur mission... Ou pire : perdre leur vie.

"Bon, commençons... "

Rasion se mit à imiter les empreinte hybrides de pas, en dessinant soigneusement à l'aide de son poignard les petits sillons laissés par les griffes des gnolls. Puis il reprit le tracé, cette fois en enfonçant profondément son arme. A cela, il ajouta des traces de tumulte en direction du mystique. Il traîna le corps par terre pour faire croire que le gardien de la Vallée des Glyphes avait été rudoyé sévèrement, et s'arrangea à entailler sa nuque circulairement, pour dessiner ensuite de petits trous : la mâchoire d'un Gnoll était désormais l'hypothèse de meurtre la plus plausible. Puis il effaça leurs empreinte, ainsi que celles de leurs montures jusqu'à l'étendue herbeuse, ce qui fut long et fastidieux, et leur prit une heure.

Et ils traversèrent les Grandes Plaines du Dalverden durant une semaine, s'échangeant à tour de rôle l'archéologue sur la croupe de leurs destriers, et ce parfois même aux cartes (secrètement bien sûr). Le vieillard ne fut pas avare en plaintes, et passait son temps à geindre.

Heureusement, les contours des cheminées tranquilles de Dal Duris, puis celle des frégates amarrées se dessinèrent.

Les deux associés ne purent réprimer un soupir de soulagement lorsqu'il arrivèrent à l'auberge. Ils allaient toucher leur butin gagné à la sueur de leur front...

"Bon, commençons... ", dit alors Rasion.

En regardant avec une mine dépitée le cadavre du mystique, Ryxem ne put s'empêcher de penser qu'il ne devait pas aimer tuer. Là n'était pas le problème, car l'arbalétrier non plus n'avait pas le goût du meurtre. Cependant, après l'alimentation, l'assassinat est un des besoins les plus importants que peuvent éprouver les être Humains. D'ailleurs, un jour, un marchand d'armes qui était le fournisseur personnel de Ryxem en ce qui concerne les armes de jet lui avait dit que les "seigneurs de la guerre" n'étaient pas forcement les Guerriers les plus aguerris ou les Mages les plus puissants, mais les armuriers et forgerons qui leur permettent de s'entretuer. Cette phrase avait laissé le voleur perplexe, et il avait souvent médité sur ces paroles durant les longues heures de chevauchées qu'il avait effectué dans le Dalverden. Maintenant, il connaissait la réponse : un Guerrier n'est rien sans son épée. Un mage n'est rien sans son livre de sorts. Ceux qui alimentent la guerre sont donc les forgerons et vendeurs d'armes. Il revint à ses pensées. Rasion avait commencé la sale besogne. Il avait fini de tracer les empreintes de pas des Hommes-Hyènes. C'était une bonne idée, et Ryxem n'y avait pas pensé. Cependant, une telle scène de crime n'aurait pas été crédible sans les traces bâtardes et désordonnées des Gnolls. Il se mit ensuite à tailler la chair pour faire croire à des crocs enfoncés dans la chair, et Ryxem l'aida à faire des entailles avec sa dague. Ils se mirent ensuite en route, en effaçant les traces de leurs montures.

La semaine de voyage retour se révéla plutôt pénible, surtout à cause de l'archéologue, qui n'arrêtait pas de se plaindre. Ce vieux bonhomme n'avait pas connu la violence des combats, et se permettait de gémir pour tout et n'importe quoi. Les blessures de Rasion avaient commencées à cicatriser et les petites plaies de Ryxem étaient quasiment refermées. Ils arrivèrent à l'auberge de Nero à Dal Duris.

Après des remerciements hâtifs de l'archéologue - pour finir - et de l'aubergiste, On leur donna leur prime de 500 Pièces d'Or. Ryxem et Rasion partagèrent les gains et prirent immédiatement une chambre dans la taverne pour rattraper des heures de sommeil bien méritées.

Après un long repos bien mérité, Rasion se leva précipitamment. Sa blessure à l'épaule ne le faisait plus souffrir, car l'aubergiste, comblé, lui avait proposé carrément les services (gratuits bien entendu), d'un Guérisseur. L'Elfe Noir tourna la tête : Ryxem dormait toujours dans un coin de la chambre. Rasion enfila ses bottes, referma la porte de la pièce derrière lui, descendit à pas de loup les marches du première étage et sortit de l'auberge endormie.

Le vent frais de l'aube lui fouettait le visage, et l'Erion pointait le bout de son nez à l'horizon. La mer, calme et paisible, semblait elle aussi se réveiller et sortir de sa torpeur. Les quais stériles semblaient se courber pour laisser passer le Missionnaire Secret.

"Vraiment, l'aube semble nous offrir le monde..." pensa-t-il vaguement.

Un petit bruit de pas, suivit d'un léger fracas de bois brisa le silence : un poissonnier étalait sa marchandise pêchée depuis l'océan d'Anstarys. L'odeur iodée commença à planer le long du port, et la vie de Dal Duris semblait reprendre petit à petit son cours agité. Rasion se hâta d'aller dans une bibliothèque à l'architecture étrange, vestige de la civilisation ô combien brillante des Neïs. L'elfe n'avait rencontré qu'une seule fois ces créatures. Elles possédaient un moyen de communication limité, et la plupart du clan avait trouvé cela drôle au point de s'en moquer. Sauf Rasion et ses parents. Mortharion éprouvait un sentiment de respect vis à vis des Neïs, disant que ces humanoïdes possédaient une forte compréhension de la magie et de Neiliona.

Il feuilleta divers ouvrages sur la Vallée des Glyphes. Il n'y en avait qu'un d'intéressant, celui d'un certain Ulracht Bartolomey, un mage aventurier qui avait voué sa vie à déceler et résoudre les mystères de Neiliona. Les deux autres n'étaient que des contes sans valeur.

"Un mystère est une porte nécessitant une clef... Et la clef de celui de la Vallée des Glyphes se trouve en son coeur, sous terre et sous la Colline Irisée, possédant une verdure à la couleur variée : allant du rouge, bleu, vert, doré, mauve sombre, blanc... soient les couleurs du Mana."

*Mmmh... Intéressant...*, pensa aussitôt Rasion. *ll me faudrait un moyen pour voyager sous terre. Si ce moyen existe, je pourrai faire remuer et déclencher toute une guerre s'il le fallait... La magie est tellement intéressante...*

L'Elfe Noir sortit de la bibliothèque, et se retrouva nez à nez avec Ryxem, qui lui présenta sous son nez un avis de recherche.

Citation :: Avis de Recherche

Kual Tork, Léonin.

Recherché pour contrebande de potions et meurtres de mystiques gardiens de la Vallée des Glyphes. Des coups de griffes ont été retrouvés sur leurs corps, en particulier sur leurs cous, à demi-déchirés. Il ne fait aucun doute que cet infâme bandit en est l'auteur. Sa localisation serait dans la Vallée des Glyphes, près de la Colline Irisée.

Ramenez-le mort ou vif.

Prime : A négocier avec le Commissaire de Dal Duris

Ryxem souria : oui, en effet, ils avaient réussi à faire passer le chapeau à quelqu'un d'autre. Encore mieux qu'aux gnolls. Et Rasion lui parla de sa découverte à propos de la Vallée... Tout semblait s'engranger à merveille...

FIN DU RP

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